Présidence annuelle de la confédération suisse :
Droite en début de mandat législatif, Gauche à la fin…..une répartition qui ne doit rien au hasard.
Nous avons dans nos précédentes études établies des prévisions économiques en fonction du calendrier électoral helvétique. Nous leur donnons à présent une portée plus générale et politique.
1) Récession la troisième année de mandat, relance la quatrième: un cycle plus tardif que la moyenne.
Le cycle électoral suisse, établi en fonction du mandat législatif, témoigne d’un certain retard. En général, la mise en place des politiques restrictives est assez précoce, dés la fin de la première année, alors qu’ici la hausse des taux d’intérêt n’apparaît qu’en seconde année, année ou le PIB est au plus haut. On observe ensuite la troisième année une profonde dégradation des résultats, tant en terme de croissance que d’emploi. Il faut attendre la quatrième année pour que les baisses des taux de change et d’intérêt exercent leurs effets expansionnistes, permettant à la croissance et à l’emploi de se redresser pour les élections. L’inflation n’ayant pas eu encore vraiment le temps de se redresser, le parlement se présente au suffrage des électeurs presque dans les meilleures conditions.
Cependant, le retard du cycle électoral helvète fait que les résultats les meilleurs relativement aux évolutions internationales seraient plutôt dans les mois suivants les élections que dans les mois précédents. Comment expliquer ce léger retard, d’un an par rapport aux autres cycles, tant dans la mise en place des politiques restrictives que dans la présentation des meilleurs résultats ? Peut être par ce qu’au pays du consensus et du pouvoir partagé, la mise en place de politique restrictive est plus lente à mettre en place.
2) La présidence de la confédération.
On sait que la confédération helvétique possède un système assez particulier de présidence tournante : les présidents sont élus pour une année civile. Dans les 4 années que dure un mandat législatif, il y aura 4 présidents successifs, actuellement en 2011 Micheline Calmy Rey.
Il est intéressant de noter que des régularités reviennent dans l’attribution de la présidence. Nos graphiques établissent la synthèse des présidences entre 1975 et 2007. On observe que les deux formations de Droite dominent en début de législature : lorsqu’une assemblé vient d’être élue on observe les deux années civiles suivantes des présidences assurées par l’Union démocratique du centre (droite) ou le Parti radical démocratique de Suisse (centre droit) .
Nos graphiques économiques nous ont montré que les débuts de mandat sont caractérisés par l’expansion économique et par des tensions inflationnistes croissantes. En début de mandat législatif l’expansion éloigne la nécessité d’une Gauche à la présidence, les tensions inflationnistes croissantes légitiment au contraire l’accession d’une Droite réputée plus rigoureuse en la matière.
Ce climat plus favorable à la Droite et à ses préoccupations conduit à la mise en place de politiques restrictives, notamment par l’élévation des taux d’intérêt. La conséquence en est, au delà de la deuxième année, une dégradation de l’économie, dégradation qui appelle à son tour la mise ne place de politiques expansionnistes et donc de la Gauche. Ainsi les formations du centre (le Parti démocrate chrétien suisse) et du centre gauche (Parti socialiste suisse), accèdent plus fréquemment au pouvoir en fin de mandature législative. Rappelons que ces changements sont avant tout symboliques, le président de la confédération n’ayant guère plus de pouvoir que les 6 autres membres du conseil fédéral.
3) 3 Paradoxes
On peut être surpris d’observer des manipulations électorales dans un pays qui se signale par l’excellence de ses résultats économiques et la stabilité de son pouvoir. On pourrait croire que seuls les gouvernements aux résultats médiocres craignent d’être rejetés dans l’opposition et se livrent à des manipulations économiques en fonction du calendrier électoral. On voit qu’il n’en n’est rien.
De même, alors qu’on pourrait croire que seul les pays ayant un Etat intervenant beaucoup possède un cycle électoral. Or la Suisse, où le degré d’indépendance de la banque centrale est grand et les dépenses sociales publiques sont relativement faibles, possède tout de même un cycle électoral.
On pourrait constater un troisième paradoxe quand au fort degré d’ouverture économique (exportations et importations rapportées au PIB) ou à la faible importance relative du PIB dans l’économie mondiale. Ces deux éléments devraient retreindre l’autonomie de la Suisse et la conduire à posséder un faible cycle électoral. Or là encore il n’en n’est rien, du reste l’exemple du Luxembourg nous avait déjà montré que des pays possédant apparemment un faible degré d’autonomie présentent tout de même un cycle électoral marqué.
4) les facteurs institutionnels, clés du cycle électoral.
C’est l’occasion pour nous d’affirmer à nouveau que si les caractéristiques économiques ont leur importance, les caractéristiques institutionnelles importent presque davantage. Or en la matière, la faiblesse que constitue pour le Luxembourg ou la Suisse des gouvernements de coalition , est largement compensé par la régularité du calendrier électoral, exempt de toute dissolution.
On peut opposer les pays ou le calendrier électoral est manipulé en fonction des évolutions de l’économie (le japon en étant la quintessence, on dissout l’assemblée à la faveur d’une reprise économique) de ceux qui manipulent l’économie en fonction d’échéances électorales fixes.
Christian Guy – Mai 2011